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Jean Giraudoux La Folle de Chaillot A la terrasse de Chez Francis, place de l'Alma, quatre louches personnages complotent de mettre la ville en coupe réglée. Dans un moment, le jeune Pierre doit dynamiter la maison de l'ingénieur qui interdit les forages du sous-sol parisien grâce auxquels ils espèrent appâter les « gogos ». Mais Pierre renonce. C'est son suicide manqué qui apprend à Aurélie, la Folle de Chaillot, sublime clocharde, que le monde n'est ni si beau ni si pur qu'elle veut bien le croire. Alors elle décide de le purger de ses escrocs, de ses profiteurs. Elle les attirera avec l'annonce d'un jaillissement de pétrole et les fera disparaître dans l'oubliette dont 1'Egoutier lui a révélé l'existence.
La Folle de Chaillot, pièce posthume, est un des derniers et des meilleurs exemples de l'art de Jean Giraudoux qui sait allier l'humour et la poésie à un sens aigu du réel.
Écrite durant l'occupation par Jean Giraudoux, "La folle de Chaillot" a été jouée pour la première fois le 19 décembre 1945 au Théâtre de l'Athénée dans une mise en scène de Louis Jouvet. L'auteur étant décédé en 1944, il n'a pu assister à la première de sa pièce et il y a fort à parier qu'il n'imaginait pas non plus que son œuvre traverserait le temps et accueillerait en son sein la dimension prophétique qu'on lui prête aujourd'hui.
"La folle de Chaillot" est une pièce en deux actes portée par le personnage loufoque, imprévisible, mais ô combien charismatique d'Aurélie, comtesse de je-ne-sais-quel comté qui "règne" sur Chaillot comme d'autres règnent sur Passy, Saint-Sulpice ou La Concorde.
Lorsqu'Aurélie découvre qu'un complot fomenté par des industriels véreux vise à s'approprier Paris en mettant à sac ses sous-sols supposément emplis d'or noir, elle réunit ses suivantes, ses appuis, ses équivalentes, bref ceux qui errent de l'autre côté de l'argent, pour leur tendre un piège. De cette rencontre, découle un second acte truculent aux dialogues incisifs, aux échanges succulents dans lequel cohabitent allègrement la folie des personnages et leur lucidité sur le monde des affaires, l'argent, le danger du pétrole.
De façon sous-jacente, Giraudoux dénonce la marchandisation galopante du monde et c'est de là que vient, sans doute, la vision prophétique qu'on lui accorde. le faux-procès dans lequel le chiffonnier se voit contraint de défendre les condamnés est à ce titre une merveille de dialogue à l'image de cette tirade que je ne peux m'empêcher de partager : "L'argent, c'est le vol, la combine, je les déteste, je ne mange pas de ce pain-là, mais c'est lui qui m'aime. Il n'aime pas la distinction, je suis vulgaire. Il n'aime pas l'intelligence, je suis idiot. Il n'aime pas les passionnés, je suis égoïste. Aussi, il ne m'a pas lâché jusqu'à mes quarante milliards. Il ne me lâchera plus jamais. Je suis le riche idéal."
La qualité de la pièce tient également à la diversité des deux actes, aussi différents que complémentaires. Il y a plus de mouvement dans le premier acte, l'attention du lecteur est souvent détourné du sujet principal par des apparitions fugaces. le deuxième acte a, quant à lui, presque des allures de huis-clos et offre un dénouement attendu, mais néanmoins surprenant.
"La folle de Chaillot" est de manière générale une pièce qui bouscule, surprend, pousse à la réflexion en tout en étant absurdement drôle. Il me tarde d'en voir une représentation.
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