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Quand, vers sept heures trente, vous vous précipitez, hagard, dans la rame de la ligne quatre direction Porte d’Orléans, en songeant déjà aux infinis couloirs de la correspondance où vous allez devoir slalomer sans égard aucun pour vos compatriotes afin d’arriver à huit heures tapantes au dix-huitième étage d’une des tours de La Défense, vous emportez rarement sous votre bras L’Apologie de Socrate de Platon. Rassurez-vous, je ne fais pas mieux, ce qui est logique, puisque j’habite dans une ville où il n’y a pas de métro…
Alors, lire ? Lire dans de telles conditions ?
Reconnaissons-le : on le constate de moins en moins. D’ailleurs, un livre en papier nécessite au moins cinquante centimètres de recul pour être lu et cet espace vital nous fait la plupart du temps défaut, à sept heures trente le matin, dans la ligne quatre du métro.
Pourtant, plus d’excuses : il y a les liseuses ! Des auteurs de science-fiction ont même sûrement déjà imaginé des livres implantés directement dans le cortex cérébral… pratique ! amusant ! sympathique !...
Mais supposons un instant que la liste des livres soit strictement établie et fixée par l’État…
Moins sympathique déjà !
Car les livres donnent à réfléchir. Ils sont subversifs.
Réfléchir, se poser des questions ne paraît cependant plus aussi vital aujourd’hui pour beaucoup d’entre nous, car nous avons le sentiment de tourner en rond dans nos pensées et de ne pas pouvoir agir sur le monde qui nous environne et qui se dégrade à une vitesse vertigineuse. C’est que nous sommes tous habités par une angoisse latente : dans quel état allons-nous laisser la planète à nos enfants ?
Alors, dans tout ça, que peuvent encore bien nous apporter ces vieux philosophes de l’antiquité ? Le mot même d’antiquité évoque la brocante, la poussière, le rétro.
Les anciens n’auraient donc plus rien à nous dire, étant vieux, dépassés, oubliés, n’ayant connu ni les smartphones ni le deuxième volet de Hunger Games ?
Pierre Hadot nous prouve le contraire, dans un style simple, limpide et dépourvu du moindre jargon, en nous montrant que le propre des philosophes de cette époque était d’appliquer leurs idées à leur mode de vie. C’était d’ailleurs à cela qu’on les reconnaissait. Les autres - ceux qui palabraient sans agir - n’étaient que des sophistes. Les vrais philosophes, eux, vivaient selon leur coeur, leurs idées, leurs idéaux. Ils ne transigeaient pas. S’engageaient pour la vie. Jusqu’à la mort parfois, comme Socrate.
Or, la vie personnelle n’est-elle pas aujourd’hui encore le denier champ véritable où nous pouvons nous-mêmes appliquer nos idées, nos principes ? Diogène vivait dans un dénuement total, préconisant une existence proche de la nature. N’y a-t-il pas là quelque résonnance avec nos problèmes actuels ?
Les anciens ne philosophaient pas, ne parlaient pas pour ne rien dire, ils vivaient. J’ignorais que, dès cette époque, ils pratiquaient également des exercices spirituels et méditatifs, comme les bouddhistes, et que des contacts avaient été établis entre eux et la civilisation indienne. Bien des choses nous surprennent dans cet ouvrage de Pierre Hadot. Et donnent ou redonnent l’envie de se plonger dans les textes de ces vieux idéalistes, rêveurs, un peu fous, mais tellement libres.
Car, heureusement : on n’est pas toujours coincés dans le métro !
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