Dans ce recueil de 13 nouvelles, la jeune autrice mexicaine frappe fort mais juste
Cesare Pavese lui avait déjà soufflé le titre de son précédent et magnifique roman, Que reviennent ceux qui sont loin. Cette fois, c’est un ouvrage entier que Pierre Adrian consacre à l’écrivain italien, l’un de ceux, avec Pasolini, qu’il a élus avec passion au rang de véritables compagnons littéraires, d’amis même, puisque « qu’un écrivain peut être l’ami qui vous réconforte », à qui l’on « demande de nous aider à vivre, de nous tenir compagnie ». Après un premier fervent pèlerinage en Italie sur La Piste Pasolini, nous voilà donc à la suite de l'auteur français sur les pas de cet autre grand nom de la littérature italienne, un homme tourmenté qui, en 1950, mettait fin à ses jours dans une chambre de l’Hotel Roma, à Turin.
Si Pasolini fut « l’écrivain de [s]es vingt ans », Pavese est maintenant pour Adrian celui de sa trentaine, « sans doute, écrit-il, parce que je ne cherchais plus de maître à penser mais seulement un ami pour me tenir compagnie. » Lui qui a fait du Métier de vivre l’un de ses livres de chevet, cette « lecture morcelée, intranquille, deven[ue] aussi la recherche d’un reflet, d’une correspondance avec [s]a propre réalité », se rend donc avec la femme qu’il aime – « la fille à la peau mate » – sur les lieux fréquentés par le maître dans les dernières années de sa vie pour tracer de lui un portrait sensible et personnel, enrichi de citations.
Emporté au gré des pérégrinations du couple entre ses lieux de vie et ceux qui furent les témoins de la descente au fond du désespoir d’un homme qui, solitaire et sans amour durable, en vint à considérer que « Mon lot à moi, c’est d’étreindre des ombres », l’on est bien vite frappé par le contraste entre l’accablement qui, parti du constat de sa mort littéraire – « Ma part publique, je l’ai accomplie. J’ai fait ce que je pouvais. J’ai travaillé. J’ai donné de la poésie aux hommes. J’ai partagé les peines de beaucoup. » Maintenant « Tout cela me dégoûte. — Pas de paroles. Un geste. Je n'écrirai plus. » – devait mener l’écrivain au suicide, et la manière dont, trois quarts de siècle plus tard, son œuvre alimente l’existence et la pensée d’Adrian, comme si les deux hommes, aussi vivants l’un que l’autre, se rencontraient régulièrement.
La passion d’Adrian est communicative. Bientôt c’est le lecteur qui, entre ombre et lumière, entre ce qui aiguillonna et assombrit l’existence de Pavese, perçoit la présence de son fantôme et le poids de son héritage littéraire. Outre une formidable incitation à lire l’auteur italien, le récit est, au travers des citations choisies, un puissant révélateur des ressorts présidant au parcours d’Adrian, à sa mélancolie – si palpable dans Que reviennent ceux qui sont loin – et à la magnificence de son écriture. Sans doute l’aîné n’aurait-il pas renié cet héritier si imprégné de son reflet. En tous les cas, sous le charme, l’on se plonge avec plaisir dans cet ouvrage, à la fois récit de voyage, enquête et quête, qui, par-delà la mort par suicide d’un écrivain, célèbre l’élan de vie que son œuvre continue d’alimenter.
L’histoire : Après une dizaine d’années, le narrateur revient passer ses vacances d’aout en Bretagne dans la grande maison familiale. Cette maison qui ne vit qu’un mois par an, qui est un personnage à part entière. Cette maison hors du temps, dans son jus, qui voit passer grand-mère, oncles et tantes , cousins et cousines . Qui les voit naitre, grandir, vieillir et mourir. Il y a ceux qui disparaissent et ceux qui reviennent.
Le narrateur , la trentaine, qui n’est plus un enfant ,mais une sorte « papa sans enfant », crée une relation avec un de ses neveux, Jean, dans lequel il se reconnait lorsqu’il était enfant.
Ce roman est rempli de détails , de descriptions , de petites choses qui semblent sans importance et pourtant qui nous font du bien , de poésie .
Dans ce roman autobiographique , Pierre Adrian réussit à créer une atmosphère de douceur. Pas de nostalgie , juste le constat que le temps passe .
Pour lui le mois d’aout ressemble à la vie : bonheur , insouciance du début de mois , puis tout bascule au 15 aout , tristesse , c’est presque l’automne. Cette « petite mort » car l’on sait qu’il est des choses que l’on ne refera plus. Et certains qui ne reviendront plus.
En vérité, en dehors du drame suggéré qui est révélé en toute fin du roman, le récit ne comporte pas d’intrigue proprement dite car la narration ne cesse d’aller du présent à l’évocation de souvenirs d’enfance dans cette même maison familiale et, en dehors de ce va et vient, il ne se passe quasiment rien. Je me suis un peu ennuyée à cette lecture même si elle m’a séduite par certains passages poétiques et la grande douceur du propos qui traduisent l'évidente tendresse de l'auteur pour le Finistère magnifiquement dépeint.
Les protagonistes secondaires de l'histoire sont attachants et bien campés. Par contre le personnage principal, dont on ne connait pas le prénom d'ailleurs, reste flou de mon point de vue. Mais sans doute est-ce une volonté de l'auteur car ce jeune homme est dans un moment de bascule vers la pleine maturité.
Cesare Pavese s’est donnéaz la mort à Turin, dans une chambre de l’Hotel Roma, le 27 aout 1950. Pierre Adrian part sur les traces de cet écrivain hanté par le suicide, à travers ses textes, ses amis et ses envies.
Une déambulation littéraire qui nous en apprend beaucoup sur Pavese, son rapport aux femmes, au métier de vivre.
A travers ce texte, c’est l’Italie d’après-guerre que l’on découvre, où la littérature tient une place prépondérante.
Ce roman a un charme fou, un style joyeux et un côté dramatique qui, loin d’effrayer, donne un certain volume au contenu.
Je me suis laissée embarquer aux côtés de Pavese dans ses derniers jours et suis maintenant curieuse de le lire.
Un roman de littérature pour vous faire connaitre un homme complexe qui l’a représentée. Un excellent roman de cette rentrée.
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