"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
La grosse, c'est Maria Louisa. Personnage principal de ce roman, elle nous expose à travers ces lignes sa vie, ses ressentis, ses expériences. Victime du regard des autres et de leurs remarques, elle se livre ici et nous raconte le peu de considération et le conformisme des personnes qui l'entourent : sa mère, toute en retenue, son père, bon vivant, Tony, sa meilleure amie séductrice, David, son amour de toujours...
Pleine de complexes, elle impose tant bien que mal ses idées et décrit ses états d'âme avec beaucoup d'humour. Elle nous offre ainsi une vision de la vie, du couple, de l'amitié, de l'amour en général, tout en pudeur et sensualité. Elle nous expose ce corps qui la fait souffrir mais lui donne également beaucoup de plaisir.
C'est un roman résolument optimiste, sur l'acceptation de soi et la liberté d'être soi.
Contrairement à ce que peut laisser supposer le titre, le surpoids n'est pas omniprésent, il est en arrière-plan de chaque situation, tapis dans l'ombre, en filigrane.
C'est une très belle lecture, douce et pleine de sensibilité, sur une femme complexe et touchante.
« La Grosse », livre intensément personnel, sans pathos, ni grincements de dent, est une bouffée d’oxygène. L’exemplarité du libre-arbitre. La force des combats et un roman puissamment optimiste, salvateur et bienfaisant.
Maria Luisa conte sa vie entre les éclaircies et les orages. Une jeune femme dont le poids diminue de 250 g chaque jour, grâce à une gastrectomie.
L’histoire n’est pas ici. Pas sur une balance dont les aiguilles chutent. Mais dans le plein d’une vigueur, d’une ténacité. Car oui, Maria Louisa va se battre. Contre la noria d’oiseaux noirs. Son corps se transforme. Elle fond. Mais ne cède rien à l’avant.
L’adolescente soumise à l’amie qui belle et voluptueuse, enserre Maria Louisa dans ses griffes. Une relation sensuelle, ambiguë. Elle lui lave son petit linge dans la rivière glacée. Lui met de la crème sur le corps. Elle exécute ses ordres au fronton d’un désir de reconnaissance de la part de Tony, qui sera tout au long de cette longue amitié intéressée, toxique et malsaine.
Maria Louisa est vive, intelligente, furieusement libre et affirmée. Mais elles ploie sous des complexes et se bat contre eux. Son corps est une armure, une ingratitude. Une jeune femme éblouie par les pleins phares d’une existence. Entre la grâce parentale, la mère qui décline vers l’autre rive et le choc des cultures. Sa famille migrante, le Mozambique inoubliable. La colonisation a laissé des stigmates. On aime la fusion volcanique. Ses expériences d’amour avec les garçons. Sans aucun tabou et la marée-basse qui autorise les gestuelles. Elle est exclusive dans cette beauté de quête de tendresse. Elle qui aimera David. Le corps assoiffé de souffle charnel, dans ce magnétisme des caresses complices.
« On dirait un cactus tendre et sans épines, cet autel devant lequel j’ai cessé de prier quand j’ai perdu mon cœur. L’honneur des bons garçons exige le respect des engagements. Je pouvais vivre sans prendre de bain, sans baisers, mais pas sans écriture. La compréhension est un châtiment ».
Maria Louisa est brillante, divinement spirituelle et vive.On ressent à sa place, tant la trame est liante, ce qu’un corps élimine d’erreurs et d’expériences floutées. Elle est dans l’engagement des tracés mêmes de sa vie.
« J’ai vendu ma maison de l’Alentejo et j’ai demandé mon transfert vers Almada. Il fallait revenir m’occuper de maman, restée seule, qui avait besoin de soins et compagnie. Mon retour à la maison, à Almada, plaisait bien à maman, qui pouvait de cette façon contrôler plus facilement mes heures d’entrée de de sortie, mes coups de téléphone et l’état général de ma peau et de mes cheveux ».
« Je suis sûre que je serai heureuse si j’étais libre ». Maria Louisa va pousser les murs. Contraindre sa déception amoureuse à son émancipation intérieure. Elle veut faire un enfant, seule. Mais ne peut garder en son ventre l’enfant, qui à chaque fois, chute dans l’abîme. Qu’importe les larmes, les douleurs, les néants et les finitudes. Elle redresse son buste, elle l’intellectuelle et la vaillante. Altière et maîtresse-femme, elle écrit. Elle dévore à pleine dent la littérature. Souveraine et la tristesse douce. Le Portugal pour macrocosme, les diktats d’un pays très misogyne encore, elle fait de la mélancolie, un levier. De ses doutes, une force et d’une rupture amoureuse, un contre-poids.
Elle dévore la vie. Somme l’ubiquité au départ. Sa métamorphose est éminente et magnétique.
« Je viens de balayer la cuisine et je vois par terre, près du balai, une aigrette de pissenlit, je la prends sans l’abîmer et je souffle ».
Elle fait tomber à ses pieds sa robe nocturne. Elle fera de l’aimé, l’horizon en advenir. Ce roman amplement autobiographique, est un hymne de confiance et de concorde pour celui ou celle qui lira ce livre. Témoin d’ une génération de femmes absolument remarquables dans une société engluée de conformisme. La maturité d’un livre audacieux, élégant, poignant et sincère. Deuxième roman d’une autrice dont le premier roman : Carnet de mémoires coloniales a obtenu le Prix des lecteurs – Littératures européennes de Cognac en 2022. Lire Isabela Figueiredo, c’est tomber amoureux (se) d’un style, d’une histoire de vie qui nous fait une sacrée accolade. C’est un livre qui ouvre et donne la réponse. Pénétrer une à une les pièces de la maison de ce livre, les décors comme les chapitres, et la résurgence d’une vie.
Traduit du portugais par João Viegas. Publié par les majeures Éditions Chandeigne.
Née au Mozambique dans les années 60, alors que ce pays est sous domination portugaise, Isabela nous raconte dans un langage cru sa vision de cette période coloniale. Le regard de son père possédant une entreprise d’électricité, employant la population locale dite « nègre ».
Les mots d’Isabela sont les mots d’une enfant qui n’est pas en phase avec la vision de ses parents, bien que très respectueuse de ces derniers, elle s’attache à son pays de naissance et essaye de ressembler aux "nègres" marche pieds nus, vend des fruits devant la maison…. C’est une enfant intelligente, joyeuse, curieuse, intuitive,
Elle pressent que son pays va vivre une grande révolution et que la fin de la colonisation est proche. Mettant ainsi fin au pouvoir de son père, ce colon, raciste, injuste, violent, méprisant.
Le départ pour le Portugal dont elle ne connait rien la mettra en situation d’apatride, finalement au Portugal, les gens lui font sentir qu’elle n’est pas de là et au Mozambique le sens de l’histoire lui prouve que ce n’est plus son pays. Elle subira la violence que vivent les « sans terre » ou les « terres perdues »
Ce livre est puissant par le devoir de mémoire, il est sensible par ses mots
Rien ne m’a gêné dans ce livre car écrit avec sincérité, intégrité. Et je pense un regard juste sur la colonisation en général, cette ambivalence des sentiments à l’égard du père.
Carnet de mémoires coloniales Isabela Figuieredo Éditions Chandeigne
La colonisation portugaise au Mozambique vue par une petite fille qui cherche à comprendre la différence que l’on fait entre les noirs et les blancs et pourquoi. Dans ce récit autobiographique le père occupe la place centrale et son histoire se déroule comme un crescendo et un decrescendo en musique. Tout commence en douceur, une famille modèle avec au centre une petite fille tout de blanc vêtue et qui n 'a pas le droit de se salir, jamais. Le papa travaille dans une centrale électrique, il est apprécié et connu par tous. Le colon, ce colosse, utilise ses employés comme des sujets, les noirs, « des fainéants » qu’il faut houspiller, qui sont à disposition et dont il se moque. Ses mains gigantesques s'abattent sur eux parfois même sans raison. Puis arrive le moment culminant, le plus inattendu, où l’incompréhension et la stupéfaction poussent les colons à fuir, à détruire, à brûler. La révolte des noirs suivie d'émeutes et de tueries arrive. Le père restera mais sa fille devra s’en aller, d'abord pour se sauver mais surtout pour raconter la vérité, pour dire là-bas, en métropole, tout ce qui se passe au Mozambique, tout ce que les blancs endurent. En rentrant elle devient une exilée, une retornados, pointée du doigt, indésirable dans ce pays d’adoption où elle est aussi mal à l’aise que dans son pays de naissance car toujours la fille du colon.
Un portrait touchant de ce père qui peut être aimant et tendre envers sa fille mais aussi se transformer en un homme cruel et violent, rempli de haine, un monstre qui exploite la population noire comme d’autres le font également, sans aucun remords. Il ne comprendra jamais la fin de la colonisation comme il ne comprendra pas non plus pourquoi ce peuple veut devenir indépendant. Il finit par retourner au Portugal pour y mourir tristement.
Belle écriture avec un rythme lent, des scènes douces qui sont situées dans la capitale Lourenço Marques, scènes de vie parfaitement illustrées. Le sentiment de cette petite fille est bien exprimé à travers le regard innocent porté sur ces blancs «généreux» qui sont fiers d’aider les noirs en leur offrant les abats d’un cabri ou des vêtements usagés dont ils n’ont plus l’utilité.
Récit très émouvant.
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