Depuis la parution du premier tome de "1Q84", j'avais envie de lire Haruki Murakami. Le Japon m'a toujours fasciné, mais pourtant, je me suis à ce jour très peu attardé sur sa littérature, préférant déambuler dans le manga aux côtés du regretté Jirô Taniguchi, de Yukito Kishiro ou de Naoki...
Voir plus
Depuis la parution du premier tome de "1Q84", j'avais envie de lire Haruki Murakami. Le Japon m'a toujours fasciné, mais pourtant, je me suis à ce jour très peu attardé sur sa littérature, préférant déambuler dans le manga aux côtés du regretté Jirô Taniguchi, de Yukito Kishiro ou de Naoki Urasawa.
Pour cette première excursion en territoire Murakami, j'ai opté pour "Des hommes sans femmes", un recueil de nouvelles, format dont l'auteur est, paraît-il, coutumier. C'était à mon sens la meilleure manière de découvrir différentes facettes de sa plume et puis, je dois l'avouer, la couleur vive de la couverture a attiré mon attention sur la table des nouveautés que présentait ma médiathèque.
Le titre du recueil, "Des hommes sans femmes", même s'il s'agit du nom de la dernière nouvelle, a une véritable signification et doit être vu comme une indication sur la configuration affective des protagonistes, mais également sur le lien qui existe entre les sept nouvelles. La plupart d'entre elles étant parures entre 2013 et 2014 dans des magazines japonais, leur présence ici tient de tout sauf du hasard. Si elles n'ont pas le même impact sur le lecteur, elles s'inscrivent dans une logique et forment un tout indissociable.
À vrai dire, cette lecture me laisse un sentiment mitigé. "Drive my car" et "Yesterday", avec leurs titres empruntés aux Beatles, m'ont happé immédiatement. J'ai été séduit en quelques lignes par la plume de Murakami, la justesse de son écriture, la poésie qui se dégage de chaque tournure, cette apparente économie de mots sans oublier ce côté contemplatif typiquement japonais qui transparaît notamment dans le rapport à la nature.
J'ai aimé également cette approche psychologique de l'amour, les schémas complexes dans lesquels les personnages s'engouffrent, révélant d'eux un trouble, un décalage sans entamer leur capital sympathie. Kafuku, qui se lie d'amitié avec l'amant de sa défunte femme pour essayer de mieux la comprendre dans "Drive my car" ou l'étrange Kitaru dans "Yesterday" sont des personnages marquants qui s'insinuent longtemps dans l'imaginaire du lecteur.
Avec "Un organe indépendant", mon enthousiasme a commencé à s'émousser. L'histoire m'a semblé plus classique, parfaitement dans le thème suggéré par le titre du recueil, mais moins pertinente. Les déboires du docteur Tokai ne m'ont pas attiré outre mesure et, si la plume est toujours aussi belle, j'ai trouvé qu'il y avait quelques longueurs et que l'histoire ne méritait sans doute pas autant d'égards.
Avec "Schererazade" et "Kino", mon intérêt a été légèrement rehaussé. "Scheherazade" s'inscrit plutôt dans la lignée de "Yesterday" dans le sens où l'essentiel de l'histoire met en scène des protagonistes plus jeunes. On retrouve également par le biais des lamproies, ces sortes d'anguilles à ventouse, ce rapport particulier qu'entretiennent les Japonais avec la nature, entre respect et fascination presque ésotérique, un côté "esprit de la nature" que l'on retrouve également dans "Kino". J'ai beaucoup aimé d'ailleurs cet aspect dans cette nouvelle, mais il est, à mon sens, trop survolé. Plus globalement, "Kino" me plaisait beaucoup au début, mais j'ai été déçu par son développement comme par son dénouement final.
Restent "Samsa in love" et "Men without women". La première est sans doute la plus originale du lot avec une situation initiale qui flirte avec le fantastique puis qui bascule lentement vers une sorte de fable, de conte initiatique à l'étrangeté certaine. La nouvelle éponyme qui clôt ce recueil retrouve, quant à elle, l'esprit des deux premières de cordée, d'où mon avis mitigé sur cette première approche de l'œuvre de Murakami.
"Des hommes sans femmes" ne m'a convaincu qu'à moitié, mais certaines nouvelles me font espérer une deuxième tentative plus heureuse, peut-être avec un roman. Après tout, un recueil s'apparente souvent à une jolie carte postale qui regroupe différents points d'intérêt à explorer. Expérience à renouveler donc.