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Maï, une femme effacée, Geetanjali Shree, Des femmes (traduit par Annie Montaut)
Maï est une femme discrète, totalement dévouée à son mari, ses beaux-parents autoritaires et ses deux enfants, Soubodh et Sounaina. Elle porte le pardah, le voile, symbole de sa soumission. Sa fille Sounaina et son fils Soubodh vont tenter de la sortir de cet état.
Dans la bonne société indienne, les places de chacun sont très codifiées, notamment celles des femmes : peu de chances pour elles de s’émanciper, d’accéder à certains emplois ; Sounaina par exemple veut faire des études de sciences pour être médecin, elle se heurte à ses père et grand-père. Il lui faudra beaucoup de ténacité, d’audace et d’aide de son frère Soubodh : "Tu crois être la seule à vouloir être quelqu’un? Moi aussi je voulais faire des études, et tous ces rêves sont partis en fumée devant mon fourneau. Quelle femme peut échapper au fourneau, études ou pas ?"
Le texte de Geetanjali Shree est écrit dans un style très direct, même lorsqu’elle parle des coutumes, des pratiques de certains : offrandes, jeûnes… Il est tellement réaliste qu’on pourrait croire à une biographie racontée parfois de manière factuelle, sans émotion particulière. Et c’est cela qui est très fort dans ce roman : on est tiraillé entre ces enfants qui veulent sortir leur mère de sa situation et elle qui renâcle, qui n’ayant rien connu d’autre depuis très longtemps. Il est difficile de ne pas râler intérieurement contre Maï qui ne se saisit pas des opportunités que lui apportent ses enfants. Et il est également difficile de ne pas la comprendre : la peur, l’angoisse de la nouveauté, d’une certaine liberté contre une routine dans laquelle, malgré les corvées, la soumission, elle se sent vivre, être utile.
Le roman est plus complexe qu’il ne pourrait paraître, Geetanjali Shree ne donne pas de réponse toute faite, mais elle invite chaque lecteur à réfléchir à la question du rôle des femmes dans la société et par extension celui des hommes. On sent bien qu’elle souhaite plus d’épanouissement, d’ouverture, de respect, l’égalité homme-femme. Son portrait de Maï est subtil, tout en nuances, loin des stéréotypes. Le portrait d’une femme et de ses enfants, le portrait de deux générations, n’ayant pas les mêmes ambitions ni les mêmes chances au départ.
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