Taïna, indienne des Caraïbes, a été instruite dès son enfance pour devenir chamane, mais Christophe Colomb et les Espagnols arrivent...
Asseyez-vous. Ici, oui, et regardez. Nous sommes devant une immense, une très longue fresque japonaise. Très ancienne aussi. Elle date du XIIe siècle nous dit-on, et elle retrace le parcours d’une frêle jeune femme, courbée sous la palanche à laquelle deux nasses bien plus lourdes qu’elle sont suspendues.
Elle marche, inlassablement, à petits pas pour ne pas ébranler l’eau des nasses et effrayer ses précieuses carpes. Elle marchera des centaines de kilomètres. Nous la regarderons cheminer à travers les forêts, escaladant les montagnes, suivant le cours de la rivière pour ne pas trop s’égarer et atteindre enfin la cité impériale, y livrer ses inestimables poissons au Bureau des Jardins et des Étangs.
Approchez. Voilà, plus près. Voyez ces détails infimes, ces petites épines qui s’accrochent à la peau, le froid mordant, les reflets de l’eau, le chemin boueux… Et les odeurs, tous ces effluves, délicieux ou nauséabonds qui s’échappent du tableau et vous sautent au visage…
Miyuki doit accomplir cette mission, autrefois dévolue à son cher époux, le meilleur pêcheur de carpes de son village, le fournisseur exclusif des étangs sacrés de la cité impériale. La rivière l’a tué. La survie et l’honneur du village tout entier reposent désormais sur les frêles épaules de Miyuki.
Ce chemin de souffrance est celui du deuil. Persuadée que son époux l’accompagne, elle avance, petits pas serrés, sandales de pailles, dans les souvenirs de leurs étreintes, d’une vie qu’elle ne retrouvera pas. Mais elle sera seule pour affronter les brigands déguisés en pèlerins, seule face à la maquerelle aux lèvres vertes, seule face à la trahison.
L’époque n’est pas à l’apitoiement. La vie humaine ?
Un détail « dans un monde où la seule certitude était l’impermanence. »
La beauté, l’harmonie, l’odeur de la vie…quête absolue de ceux qui ont déjà tout, mais qui n’ont jamais goûté à la saveur unique du dénuement, du renoncement à soi pour servir l’honneur de ceux qui n’ont plus que cela.
C’est une histoire de Japon, de carpes et d’amour. Une fresque olfactive, un roman magnifique.
Nous sommes au Japon, au XIIe siècle. La culture impériale est à son apogée, c'est l'époque Heian (qui signifie la Paix, l'esprit paisible). Ce roman est rempli de poésie, de précisions, de minutie et invité à un véritable voyage au coeur de la beauté de la culture asiatique.
L'empereur aime voir les lacs et les étangs sacrés peuplés des plus belles carpes du royaume. Katsuro est le meilleur des pêcheurs et c'est avec une immense fierté qu'il les ravitaille. Le jour où son épouse, Miyuki, apprend son décès par noyade, elle décide de quitter son village une palanche sur les épaules, pour un merveilleux voyage aux mille odeurs, aux mille couleurs, aux mille sensations.
Tout va se dérouler selon ce que son mari lui a raconté, elle ne voyage pas seule, il l'accompagne pas à pas.
Ce livre est à déguster comme lors d'une cérémonie du the pour en apprécier la subtilité des sens et de la poesie qui en découle.
Japon, période heian, XIIe siècle. Miyuki, jeune veuve est contrainte de remplacer son mari, ancien pêcheur et fournisseur en carpes des jardins de l'empereur; elle entamera ainsi un voyage initiatique qui la rapprochera spirituellement de son mari.
Savoureuses anecdotes dans ce roman magnifique.
Dans le bureau des jardins et des étangs, Didier Decoin nous plonge dans le Japon du XIIème siècle en nous relatant l’histoire épique d’une jeune femme frêle Miyuki, veuve de Katsuro fierté du petit village de Shimae. Katsuro pêche les plus belles carpes de la rivière Kusagawa et de ce fait est le fournisseur officiel des étangs impériaux.
"Mais quand les carpes, en se tortillant, plongeraient vers les profondeurs de l'étang, le fantôme de Katsuro disparaîtrait avec elles. Dans un dernier grelot de son rire, un rire d'enfant qui faisait dire à sa jeune femme qu'il ne vieillirait jamais, le pêcheur retournerai à sa mort, à son éternité. Miyuki serait seule à hurler."
Suite à la noyade tragique de son mari, et afin de garder l’honneur de son village, son épouse décide d’honorer la dernière commande reçue et de livrer elle-même 8 carpes (et non 20 comme il est d’usage) au Bureaux des jardins et des étangs pour orner les bassins des temples d’Heiankyô.
Commence alors un voyage harassant, semé d’embûches et rempli de surprises, véritable pèlerinage amoureux pour Miyuki. Elle y croisera bandits, moines, prostituées, traîtres, et devra contre vents et marées aller de l’avant. Grâce aux expériences et récits de Katsuro, son mari sera toujours auprès d’elle et contribuera grandement au fait que jamais elle ne renoncera dans sa mission.
"C'est alors que, de la bouche de Miyuki, devançant sa réponse, s'envola une petite perle de salive. Au même instant, le soleil déborda d'un nuage, ses rayons frappèrent la gouttelette qui, le temps d'une fraction de seconde, sur son trajet entre les lèvres de Miyuki et le visage de Nagusa, étincela comme un soleil minuscule."
Une atmosphère, la beauté, la nature et les odeurs omniprésentes, le rythme des saisons, des descriptions visuelles et parlantes, tout est fait dans ce roman pour que le lecteur soit dans un élément serein, agréable, hors du temps, détaché et limite en apesanteur.Et quelle réussite! La dernière partie du roman (le dernier tiers) en est un magnifique exemple: le concours de la création de parfum est relaté avec une telle subtilité, une telle maîtrise... On ne peut que humer l'odeur, la fixer et la garder longtemps. C'est d'une grande précision et d'une belle finesse.
"Là où prospéraient des pâturages et des cultures vivrières, n'affleuraient plus que des espaces de terre brune, caillouteuse, qui exhalaient une odeur de pierre à feu."
Jusqu'au bout, l'auteur sait nous garder accroché, sait nous surprendre et nous enchantait. La tristesse des derniers chapitres est contre-balancée par les leçons de la vie et l'écriture si délicieuse, sensuelle, délicate et empathique.
Le style est fluide, les mots recherchés, subtilement choisis, les phrases élégantes (notons de nombreux imparfait du subjonctif). L’écriture est poétique, si poétique, souvent chantante et envoûtante. On prend un véritable plaisir à tourner les pages et à cheminer au côté de Miyuki que l’auteur rend particulièrement attachante. L’auteur en profite pour transmettre de beaux messages et inciter le lecteur à s’interroger sur la cruauté, la pauvreté, l’absurdité de certaines règles, la détermination et l’amour d’une femme pour son mari (c’est parfois limite de la soumission…).
"Les dieux avaient crée le néant pour persuader les hommes de le combler. Ce n'était pas la présence qui régulait le monde, qui le comblait. C'était le vide, l'absence, le désempli, la disparition. Tout était rien. Le malentendu venait de ce que, depuis le début, on croyait que, vivre, c'était avoir prise sur quelque chose, or il 'en était rien, l'univers était aussi désincarné, subtil et impalpable, que le sillage d'une demoiselle d'entre deux brumes dans le rêve d'un empereur."
Ce livre est une perle dépaysante, une superbe leçon de courage, d’amour et d’humilité. Il ne faut finalement par grand-chose à Miyuki pour être heureuse. Une fois encore, la magie opère. Didier Decoin nous rend heureux, nous séduit, nous divertit, nous fait rêver tout au long du périple de Miyuki et et au final nous offre le charme et la volupté d'un grand roman.
Je ne peux que vous recommander à 200% cet excellent roman. Un grand moment de lecture!
5/5
https://alombredunoyer.com/2017/02/13/le-bureau-des-jardins-et-des-etangs-didier-decoin/
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Taïna, indienne des Caraïbes, a été instruite dès son enfance pour devenir chamane, mais Christophe Colomb et les Espagnols arrivent...
Une belle adaptation, réalisée par un duo espagnol, d'un des romans fondateurs de la science-fiction, accessible dès 12 ans.
Merci à toutes et à tous pour cette aventure collective
Lara entame un stage en psychiatrie d’addictologie, en vue d’ouvrir ensuite une structure d’accueil pour jeunes en situation d’addiction au numérique...