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Danser sur des débris

  • Déjanté peut-être mais surtout d’un profond pessimisme.

    Ne voulant pas être trop négative, j’ai attendu quelques jours avant de poser un avis. Rien n’y a fait, je suspecte toujours encore Chris Kraus d’avoir, sous couvert de personnages déjantés, voulu me convaincre que sa famille était à l’origine de ses névroses, ou tout de moins de ses souffrances psychiques. Il a certes pu profiter de cette noirceur pour faire quelques films que Volker Schlöndorff aurait jaugés de près, ce cinéaste-écrivain ne m’a pas davantage convaincu dans ce roman que précédemment dans « La Fabrique des salauds ».
    Je me suis une nouvelle fois demandée ce qui coinçait chez moi pour ne pas percevoir la patte artistique de Kraus. Tout ce que je sais c’est qu’à un moment de ma lecture, je me suis dit « non, ce négativisme emballé dans un gant de surréalisme ne sera pas contagieux ». En le mettant ainsi à distance, j’ai réussi à juste en extraire une vague histoire familiale, se passant dans une couche sociale certes très aisée, mais souffrant bien plus que les apparences ne le laissaient transparaitre.

    L’histoire est simple. Jesko retourne dans la propriété familiale à Mannheim, quittée vingt ans plus tôt. Il va y retrouver son frère Ansgar qui lui a demandé de venir, son père Gebhard Hyronimus von Solm, mais aussi et surtout sa mère Käthe.
    Lui-même est malade et en attente d’une greffe de moelle osseuse qui serait la seule à le sauver d’une mort annoncée et à pouvoir le sortir d’une vie peuplée de médocs et de seringues. Sa passion pour Sénéque est la seule chose qui m’ait interpelée.
    Son frère est tout l’opposé mais ils ne sont pas en guerre franche.
    Son père a fui Riga et l’armée russe avant de faire fortune. Il n’a maintenant qu’une obsession, trouver un donneur compatible pour son fils. Grâce à une équipe de détectives privés, il finit par mettre la main sur cette mère alcoolique, psychotique, vivant en SDF et possédant possiblement des tissus compatibles à ceux de son fils.

    Une course contre la montre commence à l’arrivée de Jesko et de Käthe au Palace familial. C’est tout ce que je dirais afin de ne rien dévoiler des faits qui suivront.

    Citation de Kraus :
    « Le blanc est la couleur des victimes. Victimes de l’amour. Victimes de la vie. Victimes des bonnes manières. Les nappes sont blanches et les agneaux immolés, et les linceuls transpercés d’épines. La couleur blanche se prête parfaitement à la capitulation ».

    Citation de Sénéque qui comparativement, m’est apparu en auteur plus positif que Kraus :
    « Le plus grand obstacle à la vie, c’est l’attente qui dépend du lendemain. Tu perds le jour présent….vis pour le présent ».

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  • Trentenaire, Jesko est un styliste excentrique, auquel le succès ne sourit que fort peu.
    Très tôt, il a quitté son environnement familial pour Berlin, pour y vivre sa vie sans trop se préoccuper des convenances et contraintes sociales.
    Désormais atteint de leucémie et dépendant d’un don de moelle osseuse, il n’a pas pour autant l’intention de changer de mode de vie. Jusqu’à ce que son père intervienne et le convoque dans la luxueuse villa familiale. Il lui annonce avoir retrouvé sa mère, aux abonnés absents depuis 20 ans, et qui pourrait bien être la seule à être une donneuse compatible.
    Tout est bien qui finit bien ? Loin de là, ce serait plutôt que tout commence à peine, et plutôt mal : la mère de Jesko est une épave, alcoolique au cerveau dérangé, et Jesko n’est pas certain de vouloir lui être redevable ad vitam, vu ce qu’elle leur a fait subir, à lui et à son frère, pendant leur enfance.

    Ces retrouvailles entre Jesko et sa mère sont l’occasion pour le lecteur de faire connaissance avec les autres membres de cette famille riche et bourgeoise qui tient par-dessus tout à sauvegarder son apparence lisse et parfaite, mais qui peine à cacher sous le vernis ses secrets plus ou moins honteux.

    « Danser sur des débris » est un roman tragico-baroque dont l’amertume est quelque peu adoucie par l’ironie et l’autodérision de Jesko, qui fait preuve de la même sérénité et du même détachement que Sénèque, son maître à penser. Du moins jusqu’à ce qu’il balance rageusement un de ses livres dans un lac en l’accusant d’hypocrisie et d’inconséquence.
    Un roman sur l’héritage, la transmission, sur les secrets de famille qui pèsent sur les générations suivantes, sur les faux-semblants, sur l’honnêteté envers les autres et surtout envers soi-même. Une tragi-comédie humaine brève et plutôt captivante.

    En partenariat avec les Editions Belfond via Netgalley. #ChrisKraus #NetGalleyFrance

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